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(fr) Socialisme Libertaire - Ni dieu, ni patron, ni mari!
Date
Wed, 10 Apr 2024 19:08:21 +0100
«NI DIEU, NI PATRON, NI MARI!» militantes anarchistes en Argentine
(1890-1930) ---- par Hélène Finet (2013) ---- «En 1896, à la faveur du
discours sur la révolution sociale prôné par des militants libertaires
bien souvent échoués sur les terres argentines par un exil force, un
groupe de femmes fonde à Buenos Aires le premier journal anarchiste
féminin du continent latino-américain, La Voz de la Mujer. Elles exigent
de pouvoir «élever[leur]voix dans le concert social et
d'exiger,[disent-elles],[leur]part de plaisirs dans le banquet de la
vie»[1]. À l'heure où la condition féminine est encore associée à une
minorité de genre, politique et sociale, cette poignée de militantes
sulfureuses rend compte de l'enfermement des femmes, qui adopte des
formes variées dans la société argentine ainsi que dans les cercles
contestataires, qui n'échappent pas à des mécanismes de confinement et
d'exclusion. En ce sens, La Voz de la Mujer va ouvrir la voie d'une
vaste exploration journalistique, littéraire et militante, à laquelle
viennent se greffer bon nombre de figures incontournables de la
contestation féminine. Dans l'écriture des femmes anarchistes, le
questionnement idéologique sur la société capitaliste se double d'un
questionnement sur la condition féminine. Femmes et anarchistes, elles
sont doublement marginales à une époque où l'anarchisme est considéré
comme un «venin social»[2]. Ouvrières pour la plupart, militantes, et
mères[3], toutes ces libertaires qui prennent la plume ou montent à la
tribune favorisent l'entrée des femmes dans l'espace public à l'image de
la «Louise Michel argentine», Virginia Bolten, elles entrent dans les
sociétés de résistance de la puissante Fédération ouvrière régionale
argentine (FORA)[4], haranguent les foules telles Salvadora Medina
Onrubia et Maria Collazo lors des manifestations «monstres» qui
envahissent la capitale lors du premier quart de siècle. Comme Juana
Rouco Buela, mère du très révolutionnaire journal Nuestra Tribuna
(1919-1922) dont elle féconde les colonnes d'un verbe rageur, ces
militantes persistent dans l'écriture féminine, au risque même de passer
pour des éléments subversifs aux yeux des hommes du mouvement
libertaire, qui n'hésitent pas à le leur faire savoir. Crânement, elles
raillent «Anarchie et liberté... et les femmes au ménage!»[5], et
revendiquent haut et fort leur identité féminine. À la différence des
militantes socialistes (Alicia Moreau ou Gabriela de Coni) dont le
combat s'inscrit dans une mouvance réformatrice s'appuyant sur les lois,
les militantes libertaires choisissent d'adopter un discours
«contre-féministe», comme l'explique Dora Barrancos[6], afin d'accéder à
une liberté capable de faire voler en éclats tous les carcans sociaux et
idéologiques qui les confinent à un espace clos où elles étouffent.
Salvadora Medina Onrubia
Salvadora Medina Onrubia
Nous nous proposons ici de restituer les différents aspects et parcours
de ces militantes hors normes afin de déterminer l'impact de leur
discours et de leurs actions sur le terrain a une période de forte
agitation sociale, tant il nous semble d'une certaine façon précurseur
du combat des femmes dans l'histoire de l'Argentine au XXe siècle. Plus
que jamais, elles questionnent la place des femmes dans un espace
militant qui leur est si peu ouvert tout en se démarquant du féminisme
classique, l'inscrivant de façon durable dans l'imaginaire social et
libertaire.
L'avant-garde anarcho-féministe
«Viens avec nous, Jeune fille, semer la justice
et la liberté. Viens avec nous et sois
la mère des générations du futur.»[7]
Ana María Mozzoni
Dès la fin du XIXe siècle, Buenos Aires devient un haut-lieu de la
mouvance anarchiste, «le siège continental et la Mecque universelle des
tendances anarchistes»[8]. Les flux migratoires[9]apportent avec eux de
nouveaux militants italiens, français ou espagnols qui enrichissent les
formes de propagande[10]dans les secteurs ouvriers et populaires et
s'enracinent durablement sur le sol argentin, permettant l'élaboration
d'une culture alternative[11]. Cependant, hormis quelques exceptions,
les femmes demeurent encore en marge de l'espace public. Dans les
cercles littéraires et mondains et les cafés de la bohemia, la
fréquentation est presque exclusivement masculine[12]. C'est alors qu'un
certain nombre de militantes décident de s'inviter aux débats
politiques. Cette avant-garde révolutionnaire d'un autre genre adopte un
discours assimilant les questions de classe et les questions de genre,
qui se matérialise dans la publication de brochures, d'articles ou de
journaux féminins. Dès 1895, la rédaction de la bibliothèque de La
Questione Sociale, revue créée sous l'influence de l'Italien
Malatesta[13], publie une série de brochures intitulées Propagande
anarchiste entre femmes qui paraissent jusqu'en 1897 et défendent
l'émancipation économique, politique et religieuse de la femme. Pour les
anarchistes, la fameuse «question sociale»[14]est indissociable de la
«question féminine». La première brochure, A las hijas del pueblo, est
l'oeuvre de la libertaire italienne Ana Maria Mozzoni, responsable de la
publication. Elle est suivie de A las muchachas que estudian, de La
religión y la cuestión social, et de A las Proletarias signée par
l'Espagnole Soledad Gustavo[15], mère de Federica Montseny et future
collaboratrice du journal La Voz de la Mujer, et la quatrième, Un
episodio de amor en la Colonia socialista de Juan Rossi, aborde le thème
de l'amour libre. Le message est essentiellement antipatriotique,
anticlérical, anticapitaliste. Suite à cette initiative, des groupes de
femmes apparaissent à Buenos Aires en 1895, notamment Humanité libre et
Quelques Femmes insouciantes[16]
Par ailleurs, certains hommes manifestent leur intérêt pour la question
féminine, et parmi eux le docteur Emilio Arana[17]qui donne plusieurs
conférences dans la province de Santa Fe sur l'émancipation des femmes.
La bibliothèque Science et Progrès de Rosario, autre pôle anarchiste de
premier plan[18]les publie sous forme de brochures largement diffusées
dans les milieux libertaires. Prenant le contre-pied du discours
hygiéniste qui criminalise l'hétérodoxie anarchiste[19], Arana défend
l'union libre et la liberté sexuelle de la femme dans La Mujer y la
familia[20], et fustige l'institution matrimoniale dans Esclavitud
antigua y moderna[21]. Dans la presse anarchiste des années 1890, des
journaux emblématiques tels que El Oprimido ou encore Germinal
manifestent eux aussi leur préoccupation pour la question féminine,
Germinal comptant même une section «Féminisme». Toutefois, relevons que
bon nombre de ces articles sont écrits sous des pseudonymes, derrière
lesquels se cachent bien souvent des hommes. Il est temps pour les
femmes de créer leur propre presse.
Le 8 janvier 1896 paraît donc le premier numéro La Voz de la Mujer,
premier journal anarcho-féministe du continent latino-americain[22],
écrit par et pour les femmes, et dont l'emblématique slogan «Ni dieu, ni
patron, ni mari» témoigne de la radicalisation du mouvement. La Voz tire
entre 1 500 et 2 000 exemplaires et compte 9 numéros jusqu'au 1er
janvier 1897. Ses rédactrices, Josefa Calvo, Teresa Marchisio, María
Calvia, Virginia Bolten, Pepita Gherra, Josefa Martínez, Carmen Lareva,
Rosario de Acuña, Luisa Violeta, proviennent des communautés espagnoles
et italiennes de Buenos Aires et s'adressent aux ouvrières[23]. Le
journal bénéficie en outre de la collaboration fort précieuse de
compañeras espagnoles de premier plan (Teresa Claramunt, Belén de
Sarraga, Soledad Gustavo...) tout en publiant Emma Goldman[24]ou Louise
Michel, icônes de l'anarcho-féminisme international. La Voz se réclame
du communisme anarchique théorisé par Kropotkine dans les années
1880-1890, et n'exclut pas le recours à la violence, donnant ainsi à ses
propos un caractère particulièrement combatif. Seule la révolution
sociale est capable à leurs yeux de «balayer le clergé, le gouvernement,
l'autorité, le capitalisme, les codes, les lois, la magistrature, et
toute cette phalange de fainéants qui ne produisent rien et qui
profitent de tout sur notre dos»[25]. Pour ces femmes, l'intégration à
la lutte sociale passe par le journalisme militant.
Virginia Bolten
Virginia Bolten
L'écriture féconde
Rappelons, à l'instar de Michelle Perrot, que l'écriture est avant tout
perçue comme une nécessité et une forme de libération pour ces femmes
qui font irruption dans l'espace public: «L'apprentissage de l'écriture
publique des femmes est au coeur du féminisme et s'avère essentiel dans
la lutte contre l'oubli et l'éphémère.»[26]L'expérience, bien que trop
brève, de La Voz de la Mujer a marqué les militantes, qui ne tardent pas
à reprendre le flambeau. En 1914, Salvadora Medina Onrubia rejoint la
rédactlon du célèbre quotidien anarchiste fondé en 1897, La
Protesta[27], devenant ainsi la première collaboratrice régulière du
journal[28]. Dans les colonnes de La Protesta, Salvadora évoque la
noblesse de la vocation journalistique contre le mensonge et
l'hypocrisie des organes de presse sous influence du pouvoir[29]. Et la
motivation première de toutes ces femmes trouve son origine dans ce
désir fécond de justice sociale, au-delà des distinctions de classe. En
ce sens, en fondant le journal Nuestra Tribuna en 1919 à Necocheca,
Juana Rouco affirme:
«Nous considérions le journal comme une arme et nous nous en sommes
servi. Tâche oh combien difficile! Prendre la plume, nous qui ne sommes
jamais entrées dans aucune salle de classe à l'université, et qui sommes
de simples prolétaires, filles de la misère et de la faim.[30]»
La récurrence de ce «nous» collectif dans la presse libertaire féminine
identifie plus que jamais l'énonciateur du message et son destinataire,
au-delà du discours de classe. Si les rédactrices de Nuestra Tribuna
sont capables de prendre la plume, alors pourquoi pas d'autres?
Et certaines vont plus loin. Salvadora Medina Onrubia s'essaie à
l'écriture théâtrale. Rappelons que, chez les anarchistes, le théâtre
occupe une place de choix dans l'éventail des représentations
culturelles destinées à la diffusion de la culture libertaire. Gorki,
Ibsen, Mirbeau ou Pérez Galdos font les belles heures des veillées dans
les centres ouvriers à la Belle Époque. Parallèlement, on assiste au
développement d'une scène théâtrale anarchiste qui remporte un franc
succès dans la capitale grâce, notamment, à l'Uruguayen Florencio
Sánchez[31], mais aussi à José de Maturana[32]ou à Rodolfo González
Pacheco[33]. C'est alors que Salvadora Medina Onrubia publie en 1914
Alma Fuerte. Elle symbolise l'irruption sur la scène porteña (de Buenos
Aires) d'une véritable écriture théâtrale féminine. Selon Silvia Saitta,
Salvadora Medina Onrubia entreprend de «construire littérairement
l'image d'une femme différente»[34]tout en questionnant le modèle
culturel dominant. Lors de la première de la pièce le 10 juillet 1914 au
prestigieux théâtre Apolo par la compagnie Gámez Rossich (María
Gámez[35]est l'une des seules femmes de la scène porteña à diriger sa
propre compagnie), La Protesta salue son style dont l'impact est
saisissant[36]. Alma fuerte renvoie aux luttes ouvrières et dénonce les
injustices sociales qui avilissent la condition féminine. La pièce met
en scène Elisa, repasseuse, et son fiancé, militant anarchiste qui
participe activement aux luttes ouvrières. Ce dernier est exilé, victime
de la loi de défense sociale[37]promulguée en 1910 et qui permet à
l'État d'expulser les éléments anarchistes d'origine étrangère. Discours
social et discours de genre sont donc indéfectiblement liés. La
production théâtrale de celle qu'on surnomme la «Vénus rouge»[38]dans
les milieux culturels de la capitale se complète avec La Solución, Un
Hombre y su vida ainsi que la très autobiographique Las Decentradas
(1929). Toutes ces Pièces figurent parmi ses productions les plus
marquantes et les plus controversées, transgressant les stéréotypes
féminins de la production littéraire de l'époque et questionnant la
binarité des conventions sexuelles. Ceci lui vaudra d'ailleurs une
certaine incompréhension des éléments les plus orthodoxes du mouvement
libertaire[39], qui éprouvent parfois des réticences à l'encontre de la
parole des femmes.
L'actrice Gloria Ferrandiz, tête d'affiche de la pièce Las Descentradas
écrite par Salvadora Medina Onrubia.
L'actrice Gloria Ferrandiz, tête d'affiche de la pièce Las Descentradas
écrite par Salvadora Medina Onrubia.
Briser les tabous
Si les mouvements contestataires fondent leur action sur un discours
révolutionnaire, force est de reconnaître que les cercles militants
demeurent principalement masculins. En dépit de leurs efforts, les
femmes se heurtent bien souvent à l'incompréhension des éléments
masculins du mouvement anarchiste, et les femmes de La Voz de la Mujer
essuient les critiques provenant de leur propre camp dès la publication
du premier numéro en 1896[40]. Elles leur répondent en les traitant de
«faux anarchistes» et leur rétorquent:
«Nous, femmes maladroites, nous avons aussi le sens de l'initiative,
celle-ci étant le fruit de notre pensée, vous savez; nous aussi, nous
pensons.[41]»
Qualifiées de «plume et langue féroces»[42], les rédactrices se lancent
dans une polémique avec leurs «ennemis» par presse interposée. La
polémique se poursuit, notamment à l'occasion de la parution d'un
article concernant l'une des collaboratrices de La Voz, Anita
Lagouardette[43]qui dénonce le comportement machiste et violent de son
ex-époux, Francisco Denambride[44], lui-même militant anarchiste. De
façon générale, bien des militantes reprochent aux hommes qui se
prétendent anarchistes de ne pas appliquer les principes qu'ils
défendent dans leur propre foyer 45]. C'est pourquoi même chez les
anarchistes la participation des femmes aux luttes sociales reste encore
anecdotique à l'orée du XXe siècle, tant les mentalités évoluent
lentement. Conscients de cette difficulté, les adhérents de la puissante
FORA tentent d'y remédier en abordant dans un premier temps le problème
du travail des femmes dans leurs congrès de 1901 à 1903. La question de
l'émancipation féminine n'est évoquée que dans le congrès de 1904, et
c'est lors de l'historique congrès de 1905[46]que l'on demande à la
femme qu'elle «accompagne l'homme dans la lutte pour l'émancipation»[47]
Parallèlement, les femmes ne tardent pas à s'organiser, puisque
l'Espagnole Juana Rouco Buela fonde en 1907 le premier Centre féministe
anarchiste, qui compte 19 membres, dont Maria Collazo et Virginia
Bolten[48]. Plus que jamais, les femmes sont invitées à rejoindre les
rangs de la révolution car, comme le réaffirme plus tard Juana Rouco
Buela, «une femme émancipée est le bras droit de son compagnon»[49]
Juana Rouco Buela
Juana Rouco Buela
Pasionarias
«Le rebelle d'aujourd'hui est le rédempteur de demain, celui qui prépare
avec son sang le chemin du futur.»
Salvadora Medina Onrubia, La Protesta, 30 avril 1923
Occuper l'espace public constitue l'un des défis majeurs des
anarcho-féministes. Le monde ouvrier auquel s'adressent les militantes
est dominé par la virilité. Si elles gravitent autour des hommes lors
des mouvements de grève ou des veillées dans les associations de
quartier, leur participation aux formes de contestation ouvrière tarde à
se matérialiser. Plus encore, le droit des femmes au travail ne va pas
de soi dans une société fondamentalement patriarcale. Le médecin de
sensibilité socialiste Juan Bialet Massé, auteur d'un rapport sur les
classes ouvrières au début du siècle, explique même que les femmes
concurrencent les hommes sur le plan du travail[50]. Dans ces
conditions, il n'existe pas de réelles formes de sociabilités féminines
dans les secteurs populaires et ouvriers. Dans la rue ou les cafés[51],
les seules femmes que l'on croise sont des prostituées. C'est en
accédant à une visibilité tangible dans l'espace public que les femmes
pourront faire entendre leurs voix. C'est ainsi que certaines militantes
s'exposent au regard des autres en prenant publiquement la parole:
Virginia Bolten, Maria Collazo ou encore Salvadora Medina Onrubia se
distinguent dans les meetings anarchistes. Dans un monde ouvrier et
syndical qui reste une affaire d'hommes, ces femmes qui assistent à des
réunions publiques ou qui versent activement dans le militantisme sont
considérées comme marginales. Pour elles, il s'agit au contraire d'une
renaissance. Comme l'évoque alors Michelle Perrot au sujet de
l'expérience européenne, «dans l'espace interdit du meeting, elles
découvrent l'ivresse de la parole et de la communion»[52]. Les
sociabilités militantes, l'expérience de la foule avec laquelle on fait
corps, le «tribalisme joyeux» sont autant d'éléments indissociables de
cette fameuse culture de la contestation si caractéristique ici de
l'anarchisme argentin. Dans l'imaginaire libertaire argentin, elle
trouve son essence dans la sacralisation de l'acte de grève et de la
manifestation de rue, qui deviennent mythiques. Et pour les femmes,
cette subversion mise en action atteint ici un degré particulièrement
élevé. En définitive, il s'agit bien là d'une expérience ultime qui
transgresse la norme sociale, comme l'explique Michelle Perrot: «Oser
faire grève, c'est braver l'opinion publique, sortir de l'usine, c'est
se comporter en fille publique.[53]» Et en Argentine, la première à
franchir ce pas, c'est l'Uruguayenne Virginia Bolten, militante
débordante d'énergie que les socialistes qualifient volontiers de
«grossière, vulgaire et violente»[54]. Ses talents d'oratrice lui valent
le surnom de «Louise Michel», elle qui prend la parole pour la première
fois lors de la manifestation du 1er mai 1890. En 1902, elle entame une
tournée de propagande dans tout le pays, et les rédacteurs du quotidien
anarcho-communiste La Protesta Humana[55]s'émerveillent:
«Si seulement nous comptions dans nos rangs beaucoup d'autres compagnes
du beau sexe qui possèdent l'enthousiasme et la constance de celle-là![56]»
Expulsée par la loi de résidence en 1902, elle revient à Buenos Aires en
1904, où elle rejoint le comité de grève de la FOA[57]. Ne connaissant
point le repos, elle prend part activement à la «grève des locataires»
dans la capitale en 1907, lutte de longue haleine au cours de laquelle
les femmes s'illustrent tout particulièrement[58].
L'autre représentante incontournable de cette mouvance anarcho-féministe
est sans nul doute Salvadora Medina Onrubia, considérée comme l'une des
initiatrices d'un féminisme radical pour l'époque[59]. Le physique de la
«Vénus Rouge» contraste singulièrement avec le reste des militantes
anarchistes qui s'étaient jusqu'à présent illustrées dans les grèves,
meetings et autres réunions, et notamment avec la très masculine
Virginia Bolten.
C'est très précisément le 1er février 1914, que Salvadora accède au rang
de pasionaria anarchiste. Lors d'un meeting organisé par La Protesta
contre la politique répressive du gouvernement, elle s'invite sur une
estrade improvisée aux coins des rues Mexico et Paseo Colón. Arborant un
foulard noir dévoilant publiquement son appartenance politique, elle
exige même de prendre la tête de la manifestation[60].
«Je suis avec vous, avec les anarchistes, ceux qui doivent marcher en
avant, la poitrine découverte, bravant le danger, sans que leur importe
de mourir pour notre bel idéal. Je donnerai l'exemple[...]c'est pourquoi
je réclame le droit de marcher avec mes compagnons, en tête, en
brandissant le drapeau rouge, qui est semblable au feu des coeurs.[61]»
Salvadora Medina Onrubia devient une habituée des manifestations au
cours de la deuxième décennie, notamment lors de l'explosion sociale de
la Semaine tragique[62]qui met la capitale à feu et à sang et rend
compte une nouvelle fois du rôle prépondérant des femmes dans les luttes
sociales[63].
Le contre-féminisme
«Le féminisme ne peut en aucun cas être un mouvement anarchiste[...], il
est stupide de qualifier l'anarchisme de masculin ou de féminin. La
seule différence qu'il y a entre nous et les hommes, c'est le sexe.»
Nuestra Tribuna, no 2, 1er septembre 1922
La nouveauté introduite dans le discours des femmes anarchistes
correspond à ce rejet si particulier du féminisme, considéré comme une
valeur bourgeoise. Elles se distinguent ainsi des militantes socialistes
et transgressent les codes du féminisme en adoptant ce que Dora
Barrancos appelle le «contre-féminisme»[64], en s'appuyant sur l'idée
qu'«il n'y a pas d'émancipation de la femme. L'émancipation que nous,
femmes libres, nous encourageons, est sociale, clairement sociale»[65].
En ce sens, la militante et journaliste Juana Rouco (Nuestra Tribuna)
dénonce l'opportunisme politique des socialistes qui militent pour
l'égalité hommes-femmes et le droit de vote:
«Conquérir pour la femme les mêmes droits que pour l'homme au regard de
la loi et de la politique électorale est un but trop pauvre[...]le
féminisme est un parti politique essentiellement bourgeois qui poursuit
un but intéressé, en même temps qu'il pervertit le coeur et la mentalité
féminine par le biais de la politique castratrice.[66]»
Et c'est précisément cette idée que l'on retrouve dans le discours d'une
des héroïnes de Salvadora Medina Onrubia:
«Nous ne voulons pas les droits des hommes. Qu'ils se les gardent.
Savoir être femme est admirable. Et nous, nous n'aspirons qu'à être des
femmes dans toute notre splendide féminité.[67]»
C'est pourquoi toutes ces militantes encouragent les femmes à former des
collectifs et à publier des revues, brochures, à organiser des
conférences dans le seul but de créer une authentique culture féminine
comme le réclame Juana Rouco Buela[68]. De plus en plus, les femmes
revendiquent haut et fort leur indépendance, à l'instar de Pepita Guerra
qui affirme clairement: «Je ne veux être la boniche d'aucun homme.[69]»
Femmes et anarchistes, certes, mais conscientes que la collaboration
entre les sexes est une nécessité dans la lutte pour la révolution
sociale. Telles sont les recommandations de Juana Rouco Buela, qui
milite par ailleurs dans la FORA, et théorise la relation entre les
femmes et la politique dans les rangs anarchistes: «Organisons-nous en
corporations et de façon anarchiste, mais sans distinction de sexe.[70]»
Par ailleurs, Juana Rouco Buela interpelle toutes les femmes, sans
hésiter à bousculer les ouvrières, les militantes et les intellectuelles
en les plaçant face à leurs responsabilités:
«Où sont les compagnes des anarchistes, on ne les voit nulle part[...].
Ne sentez-vous pas, vous aussi, tas informe de femmes exploitées, le
poids des ignominies bourgeoises? Et vous autres «intellectuelles», ou
êtes-vous, vous qui ne contribuez pas à élever la décadence mentale des
femmes?[71]»
Adhérer à la lutte devient donc une nécessité. Dans les années 1920,
d'autres militantes manifestent un engagement total, dans le sillage de
leurs «mères» libertaires. Citons ici l'une d'entre elle, Josefina
América Scarfo, compagne inséparable du sulfureux anarchiste italien
Severino Di Giovanni[72], qui met sa vie «au service de l'idéal»,
tentant de réaliser son but ultime:
«Créer: l'impossible. Conquérir: l'intangible. Aimer: la vie. Pour but:
l'idéal.[73]»
En définitive, il est fort probable que, sans l'action déterminée de ces
combattantes infatigables, la question féminine n'aurait pas reçu le
traitement et l'attention qu'elle méritait et n'aurait certainement pas
permis l'éclosion parallèle d'autres formes de luttes contre
l'enfermement des femmes dans la société argentine contemporaine. Plus
que jamais, les militantes anarchistes ont contribué à élargir la praxis
libertaire en la rendant cohérente avec une théorie parfois bien
orthodoxe. Ce qui importe par-dessus tout c'est finalement de «prendre
part au grand conflit social, comme éducatrice, comme mère, comme
propagandiste»[74].»
HÉLÈNE FINET
Université de Paris VII,
laboratoire ICT EA 337
Tiré du livre:
Viva la Social! Anarchistes & anarcho-syndicalistes en Amérique Latine
(1860-1930)
Co-éditions América libertaria
Paris (France), 2013 - 249 p.
NOTES:
[1]. Nuestros propósitos», La Voz de la Mujer, no 1, 5 janvier 1896.
[2]. Dora Barrancos, Inclusión/Exclusión. Historia con mujeres, Buenos
Aires, FCE, 2001, p. 29.
[3]. Sur le rapport entre politique et maternité voir Marcela Nari,
Políticas de maternidad y maternalismo político, Buenos Aires 1890-1940,
Buenos Aires, Biblos, 2005.
[4]. La FORA, organisation anarchiste ouvrière, domine le mouvement
ouvrier durant le premier quart de siècle en Argentine, son histoire
étant ponctuée de ruptures diverses. Voir Edgardo Bilsky, La FORA en el
movimiento obrero, Buenos Aires, CEAL, 1985.
[5]. La Voz de la Mujer, no 2, 31 janvier 1896.
[6]. Dora Barrancos, Anarquismo, educación costumbres en la Argentina de
principios de siglo, Buenos Aires, Contrapunto, 1990.
[7]. Ana Maria Mozzoni, A las muchachas que estudian, Buenos Aires,
Biblioteca La Questione Sociale, 1895, p. 11.
[8]. Juan Carulla, Al filo del medio siglo, Buenos Aires, Editorial
Llanura, 1951, p. 79.
[9]. Fernando Devoto, Historia de la inmigración en la Argentina, Buenos
Aires, Sudamericana, 2004.
[10]. Pour un panorama complet sur la question voir Ricardo Falcon, La
Primera Internacional y los orígenes del movimiento obrero en Argentina
(1875-1879), CEHSAL, Cuarderno no 2, 1980; Iaàcov Oved, El anarquismo y
el movimiento obrero en Argentina, Buenos Aires, Siglo XXI, 1978; Hélène
Finet, «Identité culturelle et politique du monde ouvrier argentin, fin
XIXe-début XXe», L'Identité culturelle dans le monde luso-hispanophone,
Nancy, Presses universitaires de Nancy, 2006, pp. 239-252.
[11]. Juan Suriano, Anarquistas, cultura y política libertaria en Buenos
Aires, 1890-1910, Buenos Aires, Manantial, 2001.
[12]. Vicente Martinez Cuitiño, dans son récit autour du café des
Inmortales, haut-lieu de la bohemia au début du siècle, mentionne la
présence d'Angela Tesada, «la seule femme du café[...]qui aime lire,
étudier, discuter, fumer». Vicente Martinez Cuitiño, El Café de Los
Inmortales, Buenos Aires, Guillermo Kraft, 1954, p. 25.
[13]. Anarchiste italien à l'origine de la théorie de la «propagande par
le fait». Persécuté par les autorités italiennes après l'épisode du
Bénévent, il s'exile en Argentine dans les années 1880 et joue un rôle
déterminant dans l'organisation du mouvement ouvrier et anarchiste,
avant de repartir en Europe.
[14]. Juan Suriano (comp.), La cuestión social en Argentina, 1870-1943,
Buenos Aires, La Colmena, 2000.
[15]. Elle utilise alors le pseudonyme de Teresa Mañé.
[16]. Gonzalo Ruvira Zaragoza, Anarquismo argentino, 1876-1902, Madrid,
Ediciones de la Torre, p. 440.
[17]. À noter aussi, parmi les contributions masculines, la conférence
de l'orateur anarchiste italien Pietro Gori, lors de son séjour en
Argentine, en 1900, publiée ultérieurement par la maison d'édition de
l'anarchiste italien Severino Di Giovanni, La donna e la famaglia
conferenza tenuta in Buenos Aires nell'antico Teatro Iris il 25 novembre
1900, Buenos Aires, Culmine, 1927.
[18]. L'historien Ricardo Falcon la qualifie de Barcelone argentine.
Ricardo Falcon, La Barcelona argentina. Migrantes, obreros y militantes
en Rosario (1870-1912), Rosario, Laborde, 2005. Sur l'anarchisme à
Rosario voir également les travaux de Agustina Prieto, notamment
«Rosario, 1904: cuestión social, política y multitudes obreras»,
Estudios sociales, Año X, no 19, Santa Fe, 2000, pp.105-119.
[19]. Voir notamment Patricio Geli, «Los anarquistas en el gabinete
antropométrico. Anarquismo y Criminología en la sociedad argentina»,
Entrepasados, Año II, no 2, Buenos Aires, 1992, pp.7-24
[20]. Emilio Arana, La Mujer y la familia, Rosario, Biblioteca Ciencia y
Progreso, 1897.
[21]. Emilio Arana, Esclavitud antigua y moderna, Rosario, Biblioteca
Ciencia y Progreso, 1898.
[22]. Sur la question du militantisme féministe dans le Cône Sud, voir
Asunción Lavrin, Women, feminism and social change in Argentina, Chile
and Uruguay (1890-1940), Lincoln, University of Nebraska, 1996.
[23]. Le taux d'analphabétisme demeure particulièrement élevé, rendant
ainsi plus difficile l'impact du discours révolutionnaire. Voir María
del Carmen Feijoo, Marcela Nari, «Imaginando el lector/la lectora de La
Voz de la Mujer», Lea Fletcher, (comp.) , Mujeres y cultura en la
Argentina del Siglo XIX, Buenos Aires, Feminaria, pp. 276-284.
[24]. Emma Goldman fonde Mother Earth en 1905.
[25]. La Voz de la Mujer, no 3, 20 février 1896.
[26]. Michelle Perrot, «Sortir», in Georges Duby, Michelle Perrot,
Histoire des femmes en Occident. IV. Le XIXe siècle, Paris, Tempus
Histoire, p. 583.
[27]. Littéralement, «la protestation».
[28]. Avant elle, Juana Rouco collabore à La Protesta en 1907, alors que
le journal est dirigé par Alberto Ghiraldo.
[29]. La Protesta, 5 février 1914.
[30]. Nuestra Tribuna, Año I, no 1, 15 aout 1925.
[31]. Sur Florencio Sánchez, voir Eva Golluscio de Montoya, «Sobre
iLadrones! (1897) y Canillitas (1902-1904): Florencio Sánchez y la
delegación de poderes», Gestos, no 6, novembre 1988, pp. 87-97. Roberto
Giusti, Florencio Sánchez su vida y su obra, Buenos Aires, 1920.
[32]. José de Maturana, Gentes Honradas, Buenos Aires, Centro de
Educación Popular, 1907; La Flor del trigo, Buenos Aires, Pascual
Mediano, 1909.
[33]. Rodolfo Gonzalez Pacheco, Teatro Completo, Buenos Aires, La Obra,
1953.
[34]. Sylvia Saitta, «Anarquismo, teosofía y sexualidad: Salvadora
Medina Onrubia», Mora, UBA, no 1, 1995, p. 55.
[35]. Beatriz Siebel, Historia del teatro argentino. Desde los rituales
hasta 1930, Buenos Aires, Corregidor, p. 486.
[36]. La Protesta, 18 janvier 1914.
[37]. Elle renforce la loi de résidence de 1902 qui avait déjà décimé
une partie des militants les plus actifs du mouvement anarchiste. Cette
loi visait à expulser les anarchistes d'origine étrangère qui mettent en
péril la sécurité de l'État. De nombreux anarchistes trouvent refuge à
Montevideo, qui devient un autre pôle incontournable du militantisme
anarchiste dans le Rio de la Plata. En dépit de ces obstacles, le
courant anarchiste se reconstitue néanmoins rapidement et participe aux
événements de la Semaine rouge en mai 1909 puis aux manifestations
contre la célébration du centenaire de l'Indépendance en 1910 qui
s'achèvent également dans un bain de sang.
[38]. Cristina Guzzo, Las Anarquistas rioplatenses (1890-1990), Phoenix,
Orbis Press, 2003, p. 69.
[39]. A ceci s'ajoute bien évidemment le fait qu'elle épouse le très
charismatique Natalio Botana, fondateur du très populaire journal
Crítica, qui la fait pénétrer dans les cercles bourgeois de la culture
porteña.
[40]. Juana Rouco Buela, en publiant Nuestra Tribuna entre 1919 et 1922
à Necochea, rencontre les mêmes problèmes: «Il y en eut beaucoup qui
augurèrent de sa disparition rapide, car il était quichottesque de
publier un journal anarchiste, écrit et dirigé par des femmes, mais ce
fut une réalité qui vécut de façon bimensuelle pendant trois ans, et qui
réveilla l'enthousiasme des femmes du monde.» Juana Rouco Buela,
Historia de un ideal vivido por una mujer, Buenos Aires, Reconstruir,
1964, p. 30.
[41]. La Voz de la Mujer, no 2, 31 janvier 1896.
[42]. La Voz de la Mujer, no 3, 20 février 1896.
[43]. La Voz de la Mujer, no 5, 15 mai 1896. Denambride reçoit Anita
Lagouardette, venue récupérer des effets personnels suite à leur
séparation à coups de feu; les rédactrices de La Voz s'en prennent aux
défenseurs du «prétendu anarchiste».
[44]. Immigré italien, Francisco Denambride appartient successivement
aux groupes Amor Libre et La Expropriación. D'une autre union, il aura
une fille prénommée Anarquia. Horacio Tarcus, Dictionario biográfico de
la izquierda argentina. De los anarquistas a la «nueva izquierda»
(1870-1976), Buenos Aires, Emecé, 2007, p. 181.
[45]. Nuestra Tribuna, no 5, 15 octobre 1922. Voir aussi l'éditorial du
no 6, 31 octobre 1922, «La collaboration de la femme à la lutte sociale».
[46]. Congrès au cours duquel est théorisé le communisme anarchique, qui
fonde les principes de l'organisation anarchiste ouvrière et la
distingue ainsi du syndicalisme révolutionnaire qui commence à émerger
en Argentine.
[47]. FORA, Acuerdos y declaraciones, op. cit.
[48]. La lutte qui s'engage pour la captation des secteurs populaires
entre socialistes et anarchistes trouve ainsi un écho chez les
militantes féminines. Dans les rangs socialistes, Carolina Muzzili
soutient la grève des lavandières dès 1895, puis quelques années plus
tard Cecilia Grierson, Gabriela Lamperiere de Coni, Julieta Lantieri,
Alicia Moreau se lancent dans le combat pour le vote des femmes et
créent le Centre socialiste féminin en 1906.
[49]. Nuestra Tribuna, no 5, 15 octobre 1922.
[50]. Juan Bialet Massé, Las Clases obreras en Argentina a principios de
siglo, Córdoba, Universidad Nacional de Córdoba, 1904, p. 424.
[51]. Sandra Gayol, Sociabilidad en Buenos Aires. Hombres, honor y
cafés, 1862-1910, Buenos Aires, Signo, 2000.
[52]. Michelle Perrot, op. cit., p. 551.
[53]. Ibid., p. 550.
[54]. La Vanguardia, Buenos aires, 23 aout 1902.
[55]. Le quotidien devient La Protesta en 1904.
[56]. La Protesta Humana, Buenos Aires, 5 mars 1902.
[57]. La Fédération ouvrière argentine, créée en 1901, devient la
Fédération ouvrière régionale argentine en 1904.
[58]. Mabel Belluci, Cristina Camusso, La Huelga de inquilinos de 1907.
El papel de las mujeres anarquistas en la lucha, Buenos Aires, Cuadernos
de Cisco, no 58, 1987.
[59]. Angel Capelletti, Carlos Rama, El Anarquismo en América Latina,
Caracas, Biblioteca Ayaucho, 1990, XLVIII (prologue).
[60]. Au cours des années 1910, les femmes prennent la tête de
manifestations anarchistes et socialistes à plusieurs reprises.
[61]. La Protesta, 3 février 1914.
[62]. Josefina Delgado, Salvadora, la dueña del diario Critica, Buenos
Aires, Sudamericana, pp. 42-44. Alors enceinte de sa fille, dans le
tumulte d'une manifestation faisant suite à l'enterrement des ouvriers
massacrés de l'usine Vasena, elle égare son fils, retrouvé par la suite
dans le local syndical de la rue México 2070.
[63]. Victor Garcia Costa, «La solidaridad femenina en la Semana
trágica», in Todo es Historia, no 390, 1999.
[64]. Dora Barrancos, Mujeres en la sociedad argentina. Una historia de
cinco siglos, Buenos Aires, Sudamericana, 2007, pp. 129-132.
[65]. Phrase qui figure en dessous du titre de la publication de Juana
Rouco Buela, Nuestra Tribuna (1922-1925).
[66]. Juana Rouco Buela, Mis Proclamas, s.l. , Lux, s.d., pp. 12-13.
[67]. Salvadora Medina Onrubia, Las decentradas y otras piezas
teatrales, Buenos Aires, Biblioteca Nacional, 2007, p. 119.
[68]. Juana Rouco Buela, op. cit, p. 13.
[69]. La Voz de la Mujer, no 2, 31 janvier 1896.
[70]. Nuestra Tribuna, no 2, 1er septembre 1922.
[71]. Juana Rouco Buela, Mis Proclamas, op. cit, p. 6.
[72]. Elle n'a que 14 ans quand elle le rencontre en 1926. Voir le
témoignage de América Scarfo dans le documentaire de Leonardo Fernandez,
Anarquistas, II, Martires y vindicadores (1919-1931), 2005 (scénario de
Osvaldo Bayer). Suite à l'arrestation puis à l'exécution de Di Giovanni
en 1931, elle continue de diffuser l'anarchisme en créant notamment en
1943 avec son époux Domingo Landolfi la librairie et la maison d'édition
Americalee, qui publie les grands auteurs du socialisme libertaire.
[73]. Lettre de Severlno Di Giovanni à América Scarfo, 6 mai 1929, citée
par Osvaldo Bayer, Severino Di Giovanni, el idealista de la violencia,
Tafalla, Txalaparta, 2000, p. 216.
[74]. Nuestra Tribuna, no 18, 1 er mai 1923.
SOURCE: Liberté Ouvrière
https://www.socialisme-libertaire.fr/2024/03/ni-dieu-ni-patron-ni-mari.html
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